Au Sénégal, les débats autour de l’examen de cette loi d’amnistie promettent de durer, car pas moins de 80 députés ont demandé à prendre la parole autour de ce projet de loi ce mercredi – très critiqué par la société civile, les organisations de protection des droits de l’homme, les membres de l’opposition, mais aussi certains députés de la majorité.
Parmi les principales inquiétudes : que cette amnistie empêche le travail de la justice, et notamment que les responsables des décès d’hommes au cours de ces manifestations – une soixantaine, selon Amnesty International – ne soient jamais poursuivis après cette amnistie. Idem pour les victimes de mauvais traitements.
La ministre de la justice Aïssata Tall Sall, venue défendre le projet de loi en commission technique mardi, a assuré que l’amnistie ne concernait pas les cas de torture ou de traitements dégradants. Et pour ce qui est des homicides, elle a affirmé que ce serait au juge de décider qui pourrait être amnistié ou non en dernier ressort.
Défiance parmi les opposants
Autre question, celle des réparations. Le projet de loi n’en parle pas. Il y aura un mécanisme d’indemnisation des victimes, là encore promis par la ministre de la Justice – avec une commission qui étudiera les dossiers au cas par cas. Mais parmi les opposants à ce projet de loi, la méfiance est forte. En trois ans, aucune poursuite pour homicide dans le cadre de ces manifestations n’a encore abouti. Beaucoup auraient donc aimé que le texte soit plus clair.
Désormais, la grande question est de savoir quel choix vont faire les députés : voter pour ou contre ? La majorité détient 81 sièges au sein de l’Assemblée nationale, il lui faut 83 voix minimum pour que le texte soit adopté. Mardi, les députés du parti d’opposition Pastef ont créé la surprise en s’abstenant. Ils n’ont pas encore dévoilé leur intention de vote ce mercredi.
Suspense aussi du côté du parti de Karim Wade. Le PDS a affirmé qu’il s’alignerait sur le choix de vote de la principale coalition de l’opposition – Yewwi Askanwi, qui a 39 sièges au sein de l’assemblée. Ces deux groupes, s’ils votent de la même façon, pourraient faire pencher la balance dans un sens ou dans l’autre. Tout est donc très ouvert.