Voilà une information qui n’est pas de nature à rassurer en perspective de la présidentielle. A moins de deux mois du scrutin, la commission électorale nationale autonome (Cena), n’a toujours pas le bon fichier électoral. Et pourtant,
elle est censée assurer le contrôle de la régularité du processus électoral et pire elle participe actuellement au contrôle des parrainages, sur la base d’un fichier électoral dont elle ne dispose pas. A moins que le contrôle se fasse avec le fichier non mis à jour dont elle dispose. Et là, ce serait encore plus grave…
Un message audio, devenu viral sur les réseaux sociaux, appelle les électeurs à se connecter sur le site internet de la CENA afin de vérifier s’ils se trouvent bien sur le fichier électoral. Mais la Cena a vite fait de souligner avec force que ledit fichier sur son site n’était pas à jour. Dans son communiqué publié en ce sens, la commission électorale nationale autonome «attire l'attention des électrices et des électeurs que la version du fichier électoral actuellement disponible sur son site web n’est pas encore mise à jour relativement à l'élection présidentielle de 2024». Ainsi, le gendarme des élections «déconseille fortement aux électeurs l’utilisation des informations actuellement sur le site. Elle précise que ces données, concernaient les élections législatives récentes, sont incomplètes et peuvent être erronées en ce qui concerne les lieux et bureaux de vote». Poursuivant l’équipe du président Abdoulaye Sylla, promet qu’elle avisera dès la disponibilité des données actualisées qui seront mises à la disposition des électeurs dès que possible.
Mais en faisant une telle précision, la Cena s’est tirée une balle au pied.
En effet, c’est un aveu de taille quant à son incapacité à jouer son véritable rôle de «gendarme» des élections. En effet, pour l’organe censé contrôler le bon déroulement du processus électoral, ne pas disposer des données à jours du fichier électoral, l’élément quasiment le plus important, à moins de 2 mois de la présidentielle, est une véritable aberration. C’est inadmissible, alors même qu’elle participe actuellement au contrôle du parrainage qui se fait au conseil constitutionnel, sur la base du fichier électoral. Comment elle peut contrôler alors l’exactitude des données, si elle n’a pas encore le vrai fichier ? Sur quel fichier ses représentants à la commission de contrôle des parrainages se basent pour faire leur travail ? Si c’est sur le fichier mis à jour pour la présidentielle, pourquoi le Cena ne l’a pas encore ? Si c’est sur la base du fichier non mis à jour, et qui est sur son site, comment pourrait-elle accepter, en tant que contrôleur du processus, que la vérification du parrainage se fasse sur un fichier non mis à jour et donc préjudiciable aux candidats qui ont opté pour le parrainage citoyen? L’un dans l’autre, cet aveu de la Cena renforce les détracteurs du processus électoral dans leur position de soupçon et de doute quant à sa transparence.
«C’est un véritable scandale…Finalement à quel fichier faut- il se fier ?» Cette aberration n’a d’ailleurs pas échappé à Aminata Touré, qui s’en est offusquée. Pour elle, c’est scandaleux que la Cena avoue ne pas disposer du bon fichier électoral à quelques encablures de l’élection présidentielle. «C’est un véritable scandale que la commission électorale nationale (CENA) nous annonce qu’à moins de deux mois de l’élection présidentielle, la version du fichier électoral actuellement disponible sur son site n’est pas encore mis à jour relativement à l’élection présidentielle du 25 février 2024», s’indigne-t-elle d’emblée. Et de poursuivre : «De quel fichier dispose donc le conseil constitutionnel pour contrôler les parrainages ? Donc la CENA qui est censée superviser l’élection présidentielle du 25 février ne dispose encore de fichier à jour ? Finalement à quel fichier faut-il se fier ?». Très remontée, elle brûle le processus électoral en cours. «Une élection présidentielle n’a jamais été organisée dans une telle nébulosité au Sénégal ! Tout ce capharnaüm électoral entache sérieusement la transparence et la sincérité du scrutin du 25 février», martèle la présidente de Mimi 2024.
Mbaye THIANDOUM