Plus de 7 millions de Sénégalais sont appelés aux urnes, ce dimanche 17 novembre, pour des élections législatives anticipées après la dissolution de l’Assemblée nationale en septembre par le président Bassirou Diomaye Faye. L’objectif des nouvelles autorités est de faire table rase du Parlement actuel, encore acquis à l’ex-président Macky Sall, pour pouvoir mettre en place leur programme et transformer le pays comme elles l’ont promis.
Le président Bassirou Diomaye Faye, élu en mars dernier, et son Premier ministre Ousmane Sonko ont besoin d’une majorité qualifié aux trois cinquièmes pour faire appliquer leur programme. Car celui-ci nécessite l’adoption de plusieurs lois constitutionnelles, comme pour la création d’un poste de vice-président, la réforme de la justice ou la suppression d’institutions jugées budgétivores, explique notre correspondante à Dakar, Juliette Dubois.
Les élections législatives anticipées de ce dimanche sont aussi le premier test électoral pour le parti au pouvoir. Après sept mois aux affaires, le Pastef confirmera-t-il son score de la présidentielle – emportée dès le premier tour à 54 % des voix – ou observera-t-on une érosion de sa base électorale, comme le promet l’opposition ? Si une certaine impatience se fait sentir dans les villes, le Pastef a obtenu le soutien, ces dernières semaines, de nombreux maires dans des départements jusqu’ici acquis à l’ancien régime comme à Podor et à Matam dans le Nord-Est, rapporte notre correspondante à Dakar, Léa-Lisa Westerhoff.
L’opposition présente trois listes, mais s’unit dans certaines localités
Face au populaire parti Pastef du président, l’opposition croit en ses chances de garder sa majorité : l’ancien président Macky Sall est revenu dans la course et se présente comme tête de liste de son parti. Malgré l’annonce de son retrait de la politique il y a sept mois, il a battu campagne à distance, depuis le Maroc où il réside actuellement. Son ancien dauphin et candidat malheureux à la présidentielle, Amadou Ba, a lancé une liste parallèle, tout comme l’ancien maire de Dakar, Barthélémy Dias.
Dans certains départements, comme à Dakar, les différentes forces d’opposition ont conclu des alliances, espérant remporter plus de sièges. Cela a été le cas dans les départements de la diaspora et de Bambey, dans le centre du pays, qui représentent 17 sièges au Parlement. Dans d’autres départements, une intercoalition se fera à deux, entre le mouvement de Macky Sall et celui de l’ex-maire de Dakar. Le principe : appeler à voter pour la formation politique de l’opposition qui est la mieux placée… pour se donner un maximum de chances de peser sur la future Assemblée nationale.
Climat tendu, accrochages violents au couteau et QG incendiés
Les deux semaines de campagne ont eu lieu dans un climat tendu, avec des violences entre le camp du président et celui du maire de Dakar Barthélémy Dias. Parmi les incidents, des QG de campagne incendiés et des dizaines de blessés partout dans le pays. Des accrochages violents ont eu lieu lundi 11 novembre entre les sympathisants du parti au pouvoir et des militants d’une coalition d’opposition, avec des blessures à coups de couteau. Le Premier ministre Ousmane Sonko a même appelé à la vengeance, avant de rétropédaler. Depuis, 81 personnes ont été interpellées. Des couteaux, lance-pierre et autres matraques ont été saisis par la police.
Ces éruptions de violence sont récurrentes au Sénégal en période électorale. Et pour Moussa Diaw, professeur en sciences politiques à l’université de Saint-Louis, c’est la preuve que les enjeux du scrutin sont importants pour les différents acteurs. « Pour l’exécutif, l’objectif est d’avoir une majorité confortable pour pouvoir gouverner et faire les réformes importantes. Compte tenu de ces enjeux, les autres aussi cherchent à se positionner, il y a des rapports de force. Cette forme de violence est exercée par un certain nombre de leaders en manque de discours ou d’offres politiques, qui utilisent la violence verbale et, malheureusement, la violence physique », explique-t-il. Le ministre de l’Intérieur a néanmoins promis que toutes dispositions sont prises pour le bon déroulement du scrutin.