La récente cérémonie de restitution du rapport d’impact des Industries chimiques du Sénégal (Ics) sur l’économie sénégalaise est une farce de mauvais goût.
Les Industries chimiques du Sénégal (Ics) ont organisé il y a quelques jours un séminaire de restitution d’un rapport qui porterait sur l’impact des Ics sur l’économie sénéga‐ laise. A cette occasion, le nouveau directeur général des Ics, Mama Sougoufara, a peint un tableau tout rose, annonçant d’ailleurs des investissements de plusieurs milliards de Fcfa pour « répondre à l’appel du gouvernement sur la contribu‐ tion à la révolution agricole et à la promotion de la souveraineté alimentaire ».
Pourtant, la meilleure manière pour les Ics d’impacter positive‐ ment sur l’économie sénéga‐ laise est de respecter la législation. Pour cause, selon la Cour des comptes, de 2000 à 2019 en tout cas, les Ics n’ont ja‐ mais payé à l’Etat la redevance minière. Aussi doivent‐elles à l’Etat, rien que durant cette période, la rondelette somme de 121.524.198.222 Fcfa. Un montant à revoir à la hausse d’autant qu’en cas de retard dans le paiement de la redevance, le Code minier indique que la somme due est majorée d’une pénalité dont le taux est fixé à 7% par mois de retard. Selon nos informations l’Etat, via le ministère du Pétrole, des Energies et des Mines, a même mis en demeure les Ics pour recouvrer cette somme.
Au‐delà, les nouvelles autorités sont en train de scruter en dé‐ tails la convention ainsi que les tractations ayant abouti au contrôle du capital des Ics par Indorama. Ce n’est pas un hasard si le Président Bassirou Diomaye Faye a actionné l’Inspection générale d’Etat (Ige). Libération était largement revenu sur l’opération ayant permis à Indorama de faire main basse sur le capital des Ics avec l’implication de plusieurs sociétés basées dans des paradis fiscaux.
Comme nous le révélions, en 2008, les Sénégalais apprenaient que 66% du capital des Ics étaient cédés au franc symbolique à Senfer Africa limited présentée alors comme la société qui devait sauver ce fleuron de l’économie sénégalaise. Mais, les Ics ont frôlé l’arrêt total et Senfer a comme par magie «servi » ses parts à Indo‐ rama. Les détails de cette opé‐ rations suspectes n’ont jamais été révélés.
Or, il apparaît clairement que Senfer Limited Africa est une société écran montée en Chypre par de lugubres actionnaires dont l’objectif véritable était de faire un «coup» et de se fondre ensuite dans la nature. A preuve, Senfer Africa limited a vu le jour quelques semaines seulement avant de «prendre» les Ics. Plus précisément, elle a été montée le 31 décembre 2007 à Chypre avec comme adresse «Kanika intern, Business center, floor 6 ». Les béné‐ ficiaires économiques de la société, très difficiles à identifier, avaient confié sa gestion au cabinet chypriote Altruco management limited, un des correspondants de Mossack Fonseca, le célèbre cabinet du Panama au cœur du scandale des Panama papers.
Plus curieux encore, bien qu’étant contrôlée par le magnat indien Sri Prakash Lohia, Indorama group holdings limited, le repreneur des Ics, est une société offshore immatriculée dans les Bahamas, un paradis fiscal encore, avec adresse au Royaume Uni. Elle dépend d’une autre société offshore : Indorama corporation Pte.Ltd, logée à Singapour.
Aux commandes de Indorama group holdings limited, on retrouve Amit Lohia, fils de Sri Prakash et vice‐président du conseil d’administration des Ics. Amit Lohia apparaît aussi physi‐ quement dans les Panama papers comme administrateur de Indorama group Holdings avec une adresse à Haviland street St Peter Port. Un chic quartier de Guernsey, un paradis fiscal qu’on ne présente plus.
CMG