CAISSE DE SÉCURITÉ SOCIALE : Tout sur un carnage financier

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A la suite du carnage finan‐ cier révélé par Libération, la direction générale de la Caisse de sécurité sociale (Css) a sorti hier un communiqué en‐ fantin, bourré de fautes avant de demander aux rédactions de ne pas le publier. Nos révéla‐ tions n’étaient que la face visi‐ ble d’une mafia organisée qui a agi en interne pendant une longue période. Tout commence le 4 juillet dernier lorsque Serigne Diouf, di‐ recteur des affaires juridiques et du contentieux de la Css a déposé à la Section de re‐ cherches (Sr) une plainte contre Mame Thierno Birahim Bob, Mamadou Sow et X pour des détournements de fonds au préjudice de la Css évalués à un peu moins de deux milliards. Face aux gendarmes, Serigne Diouf exposait que suite à la cir‐ culation d’une copie d’un chèque, d’un montant de 81.340.839 Fcfa, enregistré au nom de l’entreprise «Holding transport Bob» appartenant à Mame Thierno Birahim Bob, le directeur général financier de la Css, en l’occurrence Djibril Ba, avait commandité un audit des comptes des agences « Wiltord » sise à Colobane et « Plateau » qui révélait plusieurs malversations financières et manœuvres frauduleuses mettant en cause Mame Thierno Birahim Bob (comptable à Wiltord puis à Plateau) et Mama‐ dou Sow (caissier à Wiltord), allant de 2021 à nos jours.

Les détournements ont com mencé depuis 2021 Après avoir expliqué les détails de leur modus operandi, le sieur Diouf laissait entendre que ce stratagème a pu pros‐ pérer grâce au système des chèques émis et signés d’avance par le chef d’agence cosignataire, à l’ordre des bénéficiaires, qu’on laissait à la disposition et l’appréciation du comptable et qu’il ne devait utiliser qu’en cas d’urgence ou d’indisponibilité du chef d’agence. C’est ainsi, disait‐il, que des chèques d’approvisionnement ont été émis, en‐ caissés et détournés, sans aucune traçabilité. Entendu Djibril Ba (directeur fi‐ nancier de la Css) confirmait les déclarations plaintives avant de déclarer que ses soupçons ont été éveillés lorsqu’il a reçu de Khadim Fall (actuel chef d’agence à Wiltord) la photo du chèque sus évoqué, émis de façon frauduleuse par le sieur Bob au profit de son entreprise « Holding transport». Il soute‐ nait ensuite qu’après recouvrement et repointage des documents comptables, l’audit avait révélé un gap financier d’1.728.463.375 Fcfa.
Entendue aussi comme témoin, Odette Tine (secrétaire générale de la Css) confirmait aussi les déclarations de Djibril Ba ainsi que les détourne‐ ments et les malversations reprochés aux mis en cause. Elle faisait en outre savoir que ces derniers, convoqués en entre‐ vue par les autorités de la Css, avaient même reconnu les faits et consenti à rembourser les fonds avant de rétropédaler et de refuser de signer leur reconnaissance de dette.

Khadim Fall (chef de l’agence « Wiltord » Css) entendu à son tour faisait savoir que le sieur Bob était chargé de l’enregis‐ trement des opérations comp‐ tables, de l’établissement des chèques de paiement des pres‐ tations familiales et du libellé des chèques au nom du caissier choisi ; ce dernier devait, après retrait, procéder à l’alimenta‐ tion de la caisse et effectuer le règlement. Il devait également enregistrer les chèques dans le système. S’agissant des détournements de fonds allégués et imputés au sieur Bob, Khadim Fall soutenait qu’il fallait impérativement un audit interne pour en connaitre les tenants et les aboutissants. Aveux des mis en cause Interpellés et interrogés sous le régime de la garde à vue, Mame Thierno Birahim Bov et Mamadou Sow reconnaissaient les faits qui leur sont reprochés tout en contestant le montant avancé par les plaignants. Mamadou Sow, interrogé, in‐ formait d’abord qu’il travaille avec le sieur Bob depuis 2021.

Ensuite, il expliquait qu’étant chargé d’approvisionner la caisse, il avait remarqué qu’à chaque fois qu’il le faisait, le sieur Bob, chargé de faire entrer les données comptables, y re‐ tranchait toujours des montants qu’il ne retraçait pas dans la base de données. L’ayant interpellé à plusieurs reprises, il lui avait finalement fait savoir que s’il ne le faisait pas, la hiérarchie le ferait et en profiterait, sûrement à leur grand dam. Puis, il relatait que c’est depuis cette date qu’ils ont commencé à magouiller ensemble. A charge pour le sieur Bob de lui remettre à chaque fois des montants dont le plus important est de dix millions de francs Cfa. De même, il estimait avoir perçu, grâce à ces manœuvres frauduleuses une somme avoisinant 150.000.000 de Fcfa qu’il a dépensé pour aider ses parents et dans l’acquisition d’une parcelle de terrain à Bambilor. Enfin, il soutenait que le sieur Bob, d’une part l’avait assuré de l’intraçabilité de leurs opérations mafieuses et lui aurait d’autre part montré des preuves écrites de malversations incriminant leurs supérieurs. Interrogé, Mame Thierno Birahim Bob reconnaissait sans am‐ biguïté les faits qui lui sont reprochés, non sans faire quelques précisions ainsi que des révélations de taille qui incrimineraient certains responsables de la Css.

Il déclarait d’abord que c’est en 2020 qu’il a pris service à l’agence Wiltord de Colobane et son travail consistait d’une part à procéder à des retraits d’argent des comptes de la Css ouverts dans plusieurs banques classiques, en l’occurrence la Société générale (Sgbs), la Banque de Dakar (Bdk) et la Banque Islamique du Sénégal (Bis) ; d’autre part à procéder, après lesdits retraits, au paiement des allocations familiales. Il développait ensuite que voulant redynamiser son entreprise «Transport holding bob», l’idée lui était venu de pro‐ fiter de ces importantes et ré‐ currentes transactions financières qu’il menait pour le compte de la Css pour sous‐ traire et détourner, avec la complicité de Mamadou Sow son caissier attitré au profit de qui il enregistrait toujours les chèques d’alimentation, des fonds d’un montant avoisinant la somme de 500.000.000 de francs Cfa qu’il se partageait avec son acolyte. Puis, il concé‐ dait avoir utilisé cet argent pour acquérir, au profit de son entre‐ prise, des camions et des bus ainsi que des parcelles de terrains à Bambilor, Ndiakhirate et Keur Ndiaye Lô. Par contre, s’agissant du chèque incriminé dont font allusion ses accusa‐ teurs, il garantissait que son en‐ treprise ne l’avait pas encore encaissé.
Poursuivant, le sieur Bob mettait en cause certains de ses su‐ périeurs en les accusant d’avoir
eux aussi effectué des malversations et des détournements de fonds encore plus importants, au préjudice de la Csss et que d’ailleurs, la Cour des Comptes aurait mis au jour leur gérance scandaleuse en 2014 mais qu’au‐ cune suite n’en fût réservée. Il se dédouanait en affirmant que c’est cette impunité qui l’avait motivé à les imiter. Enfin, le sieur Bob faisait savoir que cette plainte dirigée contre lui par ses supérieurs n’est qu’une fuite en avant de ces derniers qui, depuis que Clédor Sène a fait une sortie médiatique pour vilipender une gabegie financière à l’Ipres et à la Css, ont voulu faire de lui leur bouc émissaire. Insistant sur ce fait, il les accusait même d’avoir commandité l’agression dirigée contre son épouse, lors de la‐ quelle son téléphone portable ainsi qu’une somme de 37.000.000 de Fcfa ont été emportés.
CMG