À moins de trois semaines des élections européennes, le Premier ministre français Gabriel Attal, à la rescousse d’une liste en mauvaise posture, et le grand favori d’extrême droite Jordan Bardella, se sont affrontés dans un duel télévisé parfois cacophonique. Ils ont livré deux visions irréconciliables de l’Europe.
Pendant près d’une heure et demie, les deux jeunes dirigeants – 35 ans pour le Premier ministre, 28 ans pour la tête de liste du Rassemblement national (RN) –, ont débattu d’Europe, d’immigration, de pouvoir d’achat, de la guerre en Ukraine…
Le ton d’abord policé est devenu de plus en plus offensif, voire acerbe, au cours du débat, Gabriel Attal accusant son adversaire de « détester l’Europe », de « changer d’avis sur tout ». « Je ne suis pas comme vous, moi, à changer d’avis sur tout. À ne pas assumer des déclarations passées. À dire « on veut sortir de l’Europe » puis « finalement, on veut rester dedans », « on veut sortir de l’euro », « finalement, on veut rester dedans » », a attaqué le Premier ministre.
Les thèmes abordés – marché unique, droits de douane, véhicules électriques, immigration, défense – ont sans surprise fait apparaître des lignes de fractures assez claires entre les deux camps. « Qu’il y ait des questionnements sur le projet que nous portons pour le pays que nous voulons mettre en œuvre, c’est un fait. En revanche, il n’y a pas de doute sur le bilan qui est le vôtre », a rétorqué Jordan Bardella.
L’un des échanges les plus vifs a porté sur la Russie. « Votre parti, celui de Mme Le Pen et de Jean-Marie Le Pen, avait besoin d’argent. La Russie avait besoin d’un parti en Europe pour justement affaiblir l’Europe de l’intérieur. » Et « vous avez beau avoir remboursé votre dette, vous avez un contrat moral avec eux », au Parlement européen, a lancé le Premier ministre.
Ce n’est « pas du niveau du Premier ministre de la France d’avoir des arguments aussi sous la ceinture », a répondu Jordan Bardella, accusant par ailleurs le président Emmanuel Macron de « jouer avec le feu » en n’excluant pas d’envoyer des troupes en Ukraine.
Russie et immigration
Gabriel Attal a pointé les « contradictions » et volte-face du parti d’extrême droite dans son positionnement sur l’Europe, et l’a accusé de proposer des « mesures sans queue ni tête ».
Sur l’immigration, cheval de bataille du RN, M. Bardella, a lui fustigé le pacte migratoire européen, estimant qu’il ne laissait le choix qu’entre « une immigration obligatoire ou une punition financière ». Il a répété son antienne selon laquelle « la délinquance et la criminalité sont liées à l’incapacité de maîtriser nos flux migratoires ».